10 juin, l’Onsil écrit au Président du Conseil national de l’Ordre infirmier
Monsieur Patrick Chamboredon
Président du Conseil national de l’Ordre infirmier
228, rue du faubourg Saint Martin
75010 paris
Toulouse, le 10 juin 2020
Monsieur le Président,
C’est en ma qualité de présidente de l’Onsil que je vous écris aujourd’hui.
Actuellement, vous êtes le seul organe représentant l’ensemble de la profession infirmière au Ségur de la santé, et nous regrettons que le ministre des solidarités et de la santé n’ait pas jugé bon d’inviter tous les représentants, collectifs et associations.
Aussi nous vous sollicitons afin d’appuyer notre demande de l’intégrer.
Nous œuvrons pour un élargissement de nos compétences infirmières, et sommes à même d’y participer et de contribuer de façon efficientes et pertinentes.
La grave crise sanitaire que nous avons traversée a démontré à quel point le système de sante français ne peut pas se passer de notre présence. Il est illusoire de penser que l’on peut travailler à sa refonte sans y inviter l’ensemble des représentants des infirmiers.
Face à la crise, les 700 000 infirmiers de France, quelque soient leurs modes d’exercice, ont répondu présents. Les 130 000 infirmiers libéraux, en première ligne, se sont parfaitement organisés, le plus souvent seul, sans les ars, pour gérer des situations inédites de prise en soin et maintenir les patients à domicile.
Le grand public, pour sa part, a enfin pris conscience de l’existence de notre profession mais aussi des grandes difficultés qui lui sont rattachées.
Le mille-feuilles administratif a disparu pour laisser place à une adaptation rapide des tutelles, ministère et Cnam, afin de répondre aux besoins engendrés par le covid alors que normalement les décisions se prennent en mois voir en années. Cela nous a prouvé que l’État pouvait faire vite quand il y avait urgence.
Nous sollicitons votre appui dans nos contributions auprès de l’État.
L’évolution de la profession et son maintien au sein du système de santé doit passer par :
- L’accès direct à l’infirmier pour les soins de premier recours mais aussi en créant la consultation infirmière ;
- La reconnaissance comme praticiens de santé et non plus comme auxiliaires médicaux ;
- Plus d’autonomie dans le cadre de notre exercice et de ses spécificités, l’élargissement de nos compétences pour des actes que nous effectuons couramment parmi les soins infirmiers qui relèvent de notre rôle propre ;
- Le respect de nos compétences en favorisant les collaborations entre professionnels de santé sans les mettre en opposition ;
- La reconnaissance de notre rôle naturel au quotidien et incontournable comme pilier de la coordination en ville. En l’absence des médecins généralistes, les infirmiers ont géré leurs patients chroniques mais aussi les patients covid, car nous étions les seuls à poursuivre les soins à domicile ;
- La reconnaissance de notre rôle de coordination avec l’hôpital, nous assurons déjà les retours d’hospitalisation et sommes les premiers professionnels de santé au domicile des patients ;
- Notre rôle de prévention et d’éducation, associé à une reconnaissance financière, qui a pris toute sa place pendant la crise mais était déjà acquis dans nos démarches au quotidien. Il est de nos compétences d’assurer la promotion de la sante à travers l’éducation et la prévention. Cela nous a permis de contenir l’épidémie mais aussi d’éviter des hospitalisations. Ces compétences nous ont aussi permis de prévenir les syndromes de glissement, les décompensations physiques et mentales chez les personnes fragiles qui n’avaient souvent plus que la visite de l’infirmière durant la crise, garantissant ainsi leur maintien à domicile dans des conditions optimales ;
- Par un réel investissement de nos tutelles dans la prévention primaire et l’éducation a la sante en y associant tous les acteurs de santé ;
- Par une place transversale dans notre système de santé et non une subordination toujours plus médico centrée ;
- Le droit à exercer notre profession dans un cadre et des conditions les plus favorables possibles pour les patients, respectueuses du patient et des infirmiers, pour garantir la qualité et la sécurité des soins ;
- Par l’accès aux soins sur tous les territoires. En effet, le zonage tel qu’il est conçu aujourd’hui, et le plafonnement des déplacements kilométriques, mis en place le 1er avril dernier, nuit à la prise en charge efficiente et réduit l’accès aux soins pour tous et sur tous les territoires, aggravant les déserts médicaux. Aussi nous demandons la révision du zonage et la suppression du plafond des indemnités kilométriques ;
- La reconnaissance de nos diplômes universitaires et inter universitaires ;
- De notre rôle de tuteur de stage soit reconnu officiellement ;
- Une meilleure prise en charge financière de nos formations longues ;
- La reconnaissance notre place d’acteur économique responsable car certes nous ne produisons pas de richesses matérielles mais nous sommes producteurs de soins de qualité et d’une richesse relationnelle permettant le maintien à domicile dans des conditions humainement satisfaisantes.
La santé ne doit plus être gérée comme une entreprise qui doit faire des bénéfices, mais plutôt qui doit investir sur la prévention et l’éducation pour atteindre l’objectif d’une population en bonne santé et un pays qui va bien.
Grâce aux diverses compétences et spécificités des infirmiers, notre pays a pu limiter les dégâts populationnels.
L’Etat doit s’appuyer sur les forces vives et les professionnels de terrain pour évaluer les besoins réels de notre population. Nous devons être acteurs majeurs de la refonte du système de santé, sans les infirmiers notre système de santé n’est pas viable.
Dans l’attente de pouvoir échanger avec vous sur ces sujets, et consciente du rôle majeur que vous pouvez jouer, je vous prie de recevoir, monsieur le président, l’expression de mes confraternelles salutations.
Antoinette Tranchida, Présidente.
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